Ce décret est pris en application de la loi du 24 juillet 2019, dite "Ma Santé 2022", et s'inscrit dans la feuille de route ministérielle du numérique en santé, dont l'ENS est une priorité pour l'année 2021.
Il rend possible l'ouverture automatique de l'ENS Ă partir du 1er juin 2021, sauf opposition de la personne.
Cette mesure s'applique également au dossier médical partagé (DMP), transformé en composante de l'ENS par la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (Asap).
Le texte précise les modalités d'ouverture, d'accès et de fermeture de l'ENS, et définit les modalités concernant les mineurs et les majeurs faisant l’objet d’une mesure de protection juridique.
Il prévoit "une campagne d'information destinée au grand public" et "une information individuelle réalisée par les organismes de l’assurance maladie, directement auprès des personnes concernées, par courrier électronique" ou à défaut par voie postale.
Le titulaire dispose d'un mois après l'envoi de l'information pour s'opposer à l'ouverture de l'ENS. L'absence de réponse dans ce délai vaut accord.
La personne peut également clôturer son espace "à tout moment" directement ou en en faisant la demande auprès de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam).
En cas de clôture, les données contenues par l'ENS "sont archivées pendant une période de dix ans, au cours de laquelle elles restent accessibles, sur demande auprès de la Cnam, pour tout recours gracieux ou contentieux", avant d'être supprimées.
"Si le titulaire formule une demande expresse de suppression des données de son ENS, il est informé de la suppression définitive de l’ensemble des données contenues", est-il également prévu.
Il est possible de demander "à tout moment" la création d'un nouvel ENS, même après l'avoir clôturé une première fois.
Le décret prévoit que le décès du titulaire entraîne la clôture de l'ENS par la Cnam, mais ne précise pas le devenir des données qu'il contient.
Par ailleurs, le titulaire peut autoriser "un professionnel ou un établissement de santé, social ou médico-social à consulter ou alimenter" de manière temporaire ou permanente "tout ou partie de son espace numérique de santé".
Il peut consulter toutes les actions réalisées dans son ENS, ainsi que la date, l'heure et l'identification de l'utilisateur ayant consulté ou modifié l'ENS, et peut exporter "l'ensemble des données de son espace […] dans un format intelligible et standardisé".
Les services de médecine scolaire et de médecine du travail, les "docteurs juniors" et "les personnels spécialement habilités des dispositifs d'appui à la coordination des parcours de santé complexes, des dispositifs spécifiques régionaux, et des dispositifs d'appui existants" obtiennent le droit "d'échanger ou de partager des informations" relatives au même patient, au même titre que les autres professionnels listés à l'article R1110-2 du code de la santé publique.
Le projet de décret précise les éléments composant l'ENS:
- les données administratives du titulaire, dont son identifiant national de santé (INS). L'utilisation du numéro d'inscription au répertoire d'identification des personnes physiques (dit "NIR" ou numéro de sécurité sociale) comme identifiant de santé des personnes prises en charge dans le champ sanitaire et médico-social est obligatoire depuis le 1er janvier 2021, rappelle-t-on.
- son dossier médical partagé (DMP)
- "ses constantes de santé produites notamment par des services ou outils numériques"
- "l’ensemble des données relatives au remboursement de ses dépenses de santé ainsi que, le cas échéant, les données relatives à l’accueil et l’accompagnement assurés par les établissements et services sociaux et médico-sociaux"
- "un questionnaire de santé contenant ses éventuels traitements en cours, dernières interventions et antécédents médicaux, qui peut être renseigné par le titulaire ou un professionnel, ou alimenté via un service ou outil numérique"
- une messagerie sécurisée de santé (MSSanté)
- un agenda, qui peut également être alimenté par un professionnel du secteur sanitaire, social ou médico-social
- "un catalogue d’outils et de services numériques en santé […] proposant, notamment, des services de télésanté, des services développés pour favoriser la prévention et fluidifier les parcours, des services de retour à domicile, des services procurant une aide à l’orientation et à l’évaluation de la qualité des soins, des services visant à informer les usagers sur l’offre de soins et sur les droits auxquels ils peuvent prétendre"
- "un répertoire des autorisations d’accès que le titulaire est amené à donner ou retirer, pour gérer les accès aux données de santé de son espace numérique de santé".
La gouvernance de l'ENS est assurée par le ministère de la santé et la Cnam "selon des modalités pratiques définies par convention".
Sa conception et sa mise en oeuvre sont "sous la responsabilité conjointe du ministre chargé de la santé et des autorités ou personnes publiques mentionnées" par un autre décret, prévu à l'article L1111-13-2 du code de la santé publique.
Le marché de réalisation de l'ENS a été attribué en décembre 2020 par la Cnam à Atos et au cabinet de conseil en informatique Octo Technology, rappelle-t-on.
Le projet de décret définit également les critères des "outils et services numériques en santé, développés par des éditeurs de solutions numériques publics ou privés, [pouvant] être référencés au catalogue" de l'ENS.
Ceux-ci devront respecter les référentiels d'interopérabilité, de sécurité et d'engagement éthique définis par l'Agence du numérique en santé (ANS), ainsi que le règlement général européen sur la protection des données (RGPD).
"D'autres critères […] peuvent également être pris en compte", dont les mesures en faveur de l'inclusion numérique et "des critères concernant la qualité des contenus numériques en santé définis par la Haute autorité de santé" (HAS).
La définition des critères de référencement et les conditions de suspension de celui-ci est renvoyée à un arrêté du ministère de la santé.
Les demandes de référencement au catalogue sont instruites par une "commission de référencement des services et outils numériques", créée par le texte, qui rend des avis au ministre chargé de la santé. Un avis favorable est obligatoire pour obtenir le référencement.
La commission est présidée par le ministre chargé de la santé, "représenté par le délégué ministériel au numérique en santé". Sa composition, le mode de désignation de ses membres et son fonctionnement seront définis par un arrêté du ministre de la santé.
Une convention entre l'éditeur, le ministre et la Cnam définit ensuite "les responsabilités respectives des parties, la durée du référencement, ainsi que les modalités de son éventuel retrait".
Une procédure d’audit, qui doit être définie par arrêté, garantit la conformité des outils et services "aux éléments contenus dans la demande de référencement initiale et son maintien dans le temps".
Les demandes de référencement se feront en ligne, via un service mis en oeuvre par la Cnam.
Enfin, le décret prévoit que l'éditeur puisse accéder aux données contenues dans l'ENS "à des fins de prévention, de diagnostic, de soins ou de suivi médical, social et médico-social".
Sa demande de référencement devra "en justifier la pertinence au regard de la finalité du service proposé, et préciser les modalités d’un tel accès ainsi que la durée de conservation des données collectées et les conditions de sécurité mise en oeuvre", et "préciser le contenu de l’information au titulaire qu’il entend mettre en oeuvre lors du recueil de son accord exprès préalable".
En cas de demande d'accès aux données, la commission de référencement "peut procéder à des évaluations complémentaires".
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